La Méthode Mézières
Une nouvelle vision de la rééducation
Elaborée fin des années ‘40 par une kinésithérapeute française, cette méthode a révolutionné la rééducation et apporté une nouvelle vision de la mécanique humaine.
Tour d’horizon...
Françoise Mézières fait ses études à l’Ecole Française d’Orthopédie et de Massage à Paris. Elle y apprend les techniques de l’époque, en particulier la «gymnastique corrective», fondée exclusivement sur le renforcement musculaire. Au printemps ‘47, alors qu’elle vient juste de terminer la rédaction d’un opuscule sur la gymnastique médicale de l’époque, elle fait une observation capitale et décisive qui sera le point de départ de sa méthode : les muscles du corps sont solidaires et réalisent des chaînes, notamment ceux situés à sa partie postérieure. Leur tendance habituelle va dans le sens de l’excès de tension et du raccourcissement, ce qui a pour conséquence de limiter les mouvements et de perturber la statique du corps par le jeu des adaptations et des déformations, mais aussi des douleurs, qui ne sont en fait que des effets d’une cause plus lointaine dans le temps et dans l’espace.
En ‘49, elle publie «Révolution en gymnastique orthopédique», un article fondateur qui reçoit un accueil mitigé, pour ne pas dire franchement hostile, de la part du monde médical français. Elle quitte l’école et s’installe en libéral pour mettre en pratique ses principes et continuer sa recherche. En ‘70, elle fonde l’AMIK, l’Association Mézièriste Internationale de Kinésithérapie, et diffuse sa méthode auprès des kinésithérapeutes, à travers de nombreux stages qu’elle donnera jusqu’à sa mort en 1991.
6 lois fondamentales
En ‘84, Françoise Mézières énonce 6 lois qui découlent de ses découvertes :
Première loi : les nombreux muscles postérieurs se comportent comme un seul et même muscle ;
Deuxième loi : les muscles des chaînes sont trop forts et trop courts ;
Troisième loi : toute action localisée, aussi bien élongation que raccourcissement, provoque instantanément le raccourcissement de l’ensemble du système ;
Quatrième loi : toute opposition à ce raccourcissement provoque instantanément des latéro-flexions et des rotations du rachis et des membres ;
Cinquième loi : la rotation des membres due à l’hypertonie des chaînes s’effectue toujours en dedans.
Sixième loi : toute élongation, détorsion, douleur, tout effort implique instantanément le blocage respiratoire en inspiration.
Pour Françoise Mézières, le modèle de la poupée sur lequel est fondé toute la kinésithérapie moderne est inadapté. Sur une poupée, on peut faire bouger indépendamment un membre ou un autre, sans répercussion sur le reste du corps. Ce n’est pas ce que l’on constate sur le corps humain. C’est le modèle de la poupée que la première loi bat en brèche. Mézières le remplace par le modèle du pantin dans lequel un système de ficelles relie les membres entre eux et au tronc. La deuxième loi indique que ladite ficelle est loin d’être trop faible ou détendue. Elle est trop courte et trop forte. Et donc, il n’est pas possible de mobiliser un segment sans que l’ensemble du système soit impliqué. C’est l’apparition de la notion d’intégralité. on ne peut plus prétendre soigner une partie sans prendre le tout en considération. La troisième loi exprime la condamnation du principe analytique, chère à la kinésithérapie. Mézières n’y voit qu’une dérisoire tentative de saucissonnage du corps. La quatrième loi propose une explication pour les déformations tridimensionnelles comme la fameuse scoliose idiopathique. Elle serait due, non pas à une faiblesse des muscles érecteurs rachidiens [qui pour elle n’existent pas !], mais à un raccourcissement des muscles qui sous-tendent la colonne vertébrale, la vrillant de ce fait à la manière d’un escalier en colimaçon. Quant à la cinquième loi, elle intègre les membres au processus général de déformation. La sixième loi met l’accent sur l’importance de la respiration pendant les séances de rééducation.
La technique thérapeutique
La Méthode Mézières est avant tout une méthode globale, destinée à rééduquer le corps dans sa totalité. L’objectif principal est de redonner l’unité au corps en rééquilibrant et en allongeant les différentes chaînes musculaires. Françoise Mézières a en effet constaté que les structures squelettiques humaines ne sont pas tassées par la force de la pesanteur, mais beaucoup plus par la propre force du sujet.
Afin de remédier au raccourcissement des chaînes, Mézières propose un ensemble de postures actives réalisées sur une respiration spécifique. Même si le thérapeute participe, il ne fait qu’aider, guider le travail du patient. Il est l’oeil et la main.
La thérapie vise aussi à libérer la respiration, notamment en travaillant sur le diaphragme qui, de par ses liens avec l’ensemble des chaînes musculaires, a une influence sur toute la statique et la dynamique du corps.
Concrètement
Les séances durent entre 45’ et 1h. Elles sont individuelles et réalisées par des praticiens experts qui, dans l’esprit de Mézières, ont une pratique exclusive.
Lors de la première séance, le bilan permet de faire le constat des différents blocages articulaires entraînés par les tensions dans les chaînes musculaires du sujet, mais aussi d’aborder les symptômes, les antécédents afin de commencer à dérouler le fil de l’histoire qui a amené le patient à consulter.
Par des tests très précis et localisés aux différentes articulations du corps, le patient va prendre conscience que l’étirement de certains groupes musculaires permet de recouvrer une aisance et un confort indispensables au mouvement et donc, au bien-être corporel. A l’issue de ce bilan se dessine un projet thérapeutique adapté à la personne. L’amélioration et la diminution de la douleur peuvent être rapides, mais habituellement, le traitement s’étale sur plusieurs mois, à raison d’une séance par semaine. En espaçant les séances et en travaillant avec le patient sur sa proprioception [capacité à identifier et modifier son positionnement corporel], il aura la possibilité d’intégrer un nouveau schéma corporel et ainsi retrouver son autonomie.
Cette pratique apporte aussi un précieux moment de détente qui peut se révéler très efficace contre le stress. De séance en séance, le patient se réapproprie peu à peu son corps et retrouve une facilité de mouvement qui rayonnera en silence sur chaque aspect de sa vie quotidienne.
Olivier Desurmont
Références : «Originalité de la Méthode Mézières» de F. Mézière chez Maloine, «La méthode Mézières,
un concept révolutionnaire» de M. Nisand chez J. Lyon & le site de l’AMIK : http://pagesperso-orange. fr/asso.mezieres/
- voir la rub. «Méthode Mézière» de l’agenda des activités et de l’ANNUAIRE Plus 2009 - Rubrique 2220