Vegan et enceinte, est-ce compatible ?
Encore en marge de la société, le veganisme n’a pas toujours bonne presse. Et quand il est en plus associé à la grossesse, le débat s’enflamme. Pourtant, une fois de plus, c’est avant tout une question d’équilibre.
Etre vegan, c’est exclure de son alimentation tout produit animal et ses dérivés. Pas de viande, pas de poisson, aucun produit laitier, ni oeufs, ni miel. S’il est largement accepté dans les pays anglo-saxons, le veganisme continue d’effrayer en Europe, étant perçu comme un régime alimentaire trop extrême. Cette peur vient souvent d’un manque de connaissance. Il suffit de se rappeler comme le végétarisme a lui aussi souffert de beaucoup de scepticisme et de critiques alors qu’aujourd’hui cette pratique alimentaire est très répandue et de nombreuses études démontrent la bonne santé des végétariens.
Grossesse et alimentation
Une future maman doit faire attention à manger des aliments qui lui apportent un maximum de bons nutriments indispensables à la bonne formation du foetus. Les nombreux interdits du régime vegan soulèvent la question des carences qui pourraient nuire au bon développement de l’enfant à venir. Il est vrai que les neuf mois qui précèdent l’arrivée d’un bébé demandent une attention toute particulière et ce, quel que soit le régime alimentaire adopté.
Nombreuses sont les femmes qui suivent un régime composé de viande, poisson et produits laitiers, qui doivent néanmoins prendre beaucoup de suppléments car leur alimentation n’est pas assez équilibrée et diversifiée. Manger de tout n’est pas toujours synonyme d’une hygiène alimentaire au top. Produits transformés, mauvaises graisses, trop de sucre, voilà les ennemis d’une alimentation saine. Plus que « manger de tout », il est primordial de « bien manger » afin d’apporter au corps tout ce dont il a besoin.
Un vegan carencé est un vegan mal renseigné
Une alimentation comportant beaucoup d’interdits demande une très bonne connaissance en nutrition et en associations alimentaires. L’important est de privilégier les aliments ayant une bonne densité nutritionnelle. Les femmes vegans mangent une quantité abondante de légumes à feuilles et par conséquent encourent un moins grand risque de manquer d’acide folique (vitamine B9), très important pour le système nerveux du bébé. Si les besoins en calcium sont plus élevés durant la grossesse, on le sait aujourd’hui, les produits laitiers ne sont pas les seuls à apporter le calcium dont le corps a besoin. Une alimentation riche en amandes, brocolis, cresson, haricots (la liste est longue) en apportera en quantité.
Quant au fer qui est indispensable pour les organes comme l’utérus et les reins et qui contribue à la construction du placenta et du cordon ombilical, on le trouve dans les lentilles, le quinoa et les graines qui forment la base du régime vegan. Si le corps a besoin de graisses, elles doivent être de bonne qualité et se trouvent dans les avocats, les graines de chia, l’huile d’olive ou les algues. Légumineuses et céréales, voilà le mélange gagnant pour pallier le manque en acides aminés. Question vitamines, il faut faire attention à ne pas être carencée en B12, présente essentiellement dans la viande, le poisson et les fromages.
De manière générale, il faut veiller à réduire les aliments riches en glucides comme les pâtes et le pain car une trop grande consommation peut mener au diabète de grossesse. Les études montrent une prise de poids normale chez les végétariens et vegans. Leurs choix alimentaires privilégiant le bio, les produits de saison, leur corps est généralement moins pollué par des toxines.
Cela ne s’improvise pas
Il est rare qu’une femme s’improvise vegan au moment où elle souhaite tomber enceinte. De manière générale, ce choix n’est pas nouveau et tout un travail en amont a déjà été fait. Toute grossesse demande un suivi très régulier qui s’accompagne de prises de sang afin de vérifier la bonne santé de la femme enceinte. Cette période de gestation doit être planifiée, suivie, afin d’être menée au mieux. Les besoins en nutriments augmentent et parfois il est difficile de les couvrir par l’alimentation. Les futures mamans vegans courent beaucoup plus de risques de souffrir de carences notamment en vitamine B12, fer, calcium, vitamine D et oméga-3. L’important est de s’entourer de professionnels avec lesquelles on se sent en confiance, qui ne portent pas de jugement par rapport au choix alimentaire et qui vont mettre tout leur savoir au service du bon déroulement de la grossesse. Si des carences sont mises en évidence, alors il faut accepter – quel que soit le régime alimentaire - de prendre des suppléments. La plupart des femmes en général se voient prescrire un supplément prénatal par leur gynécologue.
Les enfants vegans
Pour celles qui ne peuvent ou ne veulent pas allaiter, il existe des substituts de lait maternel enrichis et réglementés. Les simples laits végétaux du commerce ne peuvent en aucun cas remplacer l’allaitement ou les substituts, comme l’a démontré ce cas dramatique de bébé mort pour avoir été nourri uniquement avec du lait végétal. Après l’allaitement exclusif, les bébés vegans devront consommer des sources végétales abondantes en fer et en zinc, ne pouvant pas consommer de chairs animales qui en contiennent de formes hautement assimilables. Une fois de plus la diversification est de mise. N’oublions pas qu’un bébé triple le poids de sa naissance en 12 mois.
Les médias ont montré des cas dramatiques de bébés nourris au lait végétal en France ou exclusivement avec des pommes de terre aux Etats-Unis. Cela est tragique et met en évidence une fois de plus l’importance d’un suivi très régulier par des professionnels. De plus en plus de pédiatres sont ouverts aux choix moins classiques et sont des alliés indispensables. Certaines pédiatres disent que le régime vegan n’est pas adapté au nouveau-né, mais recommandent plutôt de choisir un régime végétarien bien étudié. La tenue soigneuse des courbes de croissance reste un indicateur précieux. Sans le savoir, de nombreux parents ne donnent pas une alimentation appropriée à leurs bébés, d’où l’importance de consulter. Quoiqu’il en soit, le veganisme n’est pas un terrain d’expérimentation. Bon sens et information sont de mise.
Vanessa Jansen
RÉFÉRENCES :
• « Guide nutritionnel Vegan », Sonja Reifenhäuser, Ed. La Plage
• « Enceinte végétarienne » Hélène Delfosse Ed. Terre Vivante
• « Bébé veggie », Ophélie Véron, Ed. La Plage
Paru dans l'Agenda Plus N° 306 de Avril 2019